Vendredi 8 Février 2019
Vendredi 8 Février 2019
Les récentes décisions de Migros et Coop révèlent une attitude arrogante et à contre-courant des attentes sociétales. Les labels, garantissant les engagements en matière de bien-être animal ou de protection de l’environnement, assurent le lien de confiance tout au long de la chaîne alimentaire. Mais force est de constater que les efforts et investissements consentis par les producteurs sont soudainement bafoués par des considérations purement monétaires.
Les grands distributeurs parviennent bien à faire manger des fraises à des gens qui ne s’imagineraient même pas en acheter en février. Alors avec ce pouvoir, pourquoi ne s’efforcent-il pas de mieux promouvoir des labels fondés mais qui connaissent des difficultés d’écoulement ?
On se souvient des discussions sur la détention des porcs avec la nécessité d’aller plus loin en matière de bien-être animal. Un engagement envisageable pour autant que le marché en rétribue les surcoûts, via les labels. Mais la réalité dictatoriale de la grande distribution est d’inciter puis de lâcher voire d’établir ensuite des standards de prise en charge sur ce qui était jusqu’alors des programmes volontaires.
Le fait que la politique agricole s’en mêle n’arrange pas les choses. Les acheteurs ont facile de se référer aux aides étatiques pour prétendre que les engagements sont déjà indemnisés comme pour les systèmes de stabulation, la PLVH ou la détention plein air. Mais cela ne les empêche pas de se servir au niveau de leurs marges en invoquant, pour être tendance, la durabilité.
La durabilité, parlons-en, avec l’émergence des « laits durables ». Les maigres 2 ct sensés rétribuer le lait durable pourraient s’évaporer aussi vite que les fluctuations saisonnières. L’OFAG reconnait même que le soutien accru aux systèmes de production dans la PA22+ est un moyen de soutenir les efforts des branches visant la valeur ajoutée. Les producteurs de lait qui perdraient sur les contributions de base devraient se rattraper sur les systèmes de production, donc en s’engageant davantage, pour tenter de maintenir leur niveau de paiements directs. De l’autre côté, les acheteurs auront vite fait d’invoquer le soutien élargi à la PLVH pour relativiser le faible supplément lait durable.
Ces exemples illustrent une tendance néfaste de faire financer, par les aides publiques, ce qui devrait être rétribué par le marché. La grande distribution doit aider au positionnement pas seulement pour ses propres intérêts mais par responsabilité envers ses fournisseurs et ses clients. La valeur ajoutée doit donc se faire via les marchés. La durabilité est à ce prix !
Michel Darbellay, directeur AgriJura